Bali, tout au coeur des rizièresMarie-Morgane Le Moël [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Photo : Marie-Morgane Le Moël
Les sentiers de randonnée sont nombreux autour de Munduk.
Certains permettent de passer au milieu des rizières. Bali, dans l’archipel indonésien, est connue pour ses plages accueillantes. Mais l’intérieur de l’île offre bien d’autres possibilités au coeur des rizières.
«Maintenant, prenez la posture du chien renversé », ordonne l’instructrice de yoga, une jeune femme aux longs cheveux blonds, la vingtaine souriante. Tout autour de la salle, les yogis amateurs s’exécutent. Alors que les postérieurs se dressent vers le ciel plus ou moins gracieusement et que les tendons peinent à se relaxer, on se rend vite compte que nos voisins sur le plancher du Yoga Barn sont en fait tous des Occidentaux.
« Ce soir, c’est le Nouvel An balinais. Nyepi, ou le jour du silence. L’occasion pour nous de penser aux choses mauvaises qui nous sont arrivées cette année, pour en finir avec elles », intime encore l’instructrice. Pas facile, entre deux crampes, de se concentrer sur la signification des malheurs de l’année précédente. Mais le lieu, qui surplombe une rizière, invite néanmoins à la relaxation les visiteurs, venus des quatre coins du monde.
Bienvenue à Ubud, petite ville au coeur de Bali, à une heure de route de l’aéroport international de Denpasar. Ubud n’attire pas les mêmes touristes que les plages surpeuplées du sud. Ici, dans les rues, on ne voit guère de maillot de bain, mais il est de bon ton de porter d’amples pantalons de chanvre, et les restaurants regorgent de menus végétariens. Cet aspect de Mecque pour Occidentaux en quête de paix intérieure s’est accentué depuis que l’Américaine Elizabeth Gilbert, auteure de l’ouvrage à succès Mange, prie, aime, est passée par là. En réaction, l’un des restaurants de la ville affiche même ce dicton en forme de clin d’oeil : « Eat, pay, leave ».
Pourtant, malgré l’afflux de touristes new age, difficile de ne pas être séduit par le bourg entouré de rizières. Car Ubud a gardé son identité balinaise. Comme ailleurs sur cette île majoritairement hindoue de quelque trois millions de personnes, chaque quartier a un temple, où les habitants viennent déposer des offrandes de fleurs ou de nourriture plusieurs fois par jour. Il n’est pas rare non plus d’y apercevoir une cérémonie ou une procession religieuse, en se promenant dans les ruelles étroites.
Avec sa beauté, Ubud, qui compte avec les villages environnants quelques dizaines de milliers d’habitants, attire les Occidentaux depuis longtemps, dont des artistes. Ainsi, le peintre allemand Walter Spies, arrivé à la fin des années 1920, a contribué à faire d’Ubud le centre culturel de Bali. Désormais, les galeries d’art présentant le travail d’artistes locaux et internationaux sont nombreuses. On peut aussi se rendre au Musée Puri Lukisan, sur la rue principale, qui présente des oeuvres capitales de la peinture balinaise. La ville est, en outre, l’endroit idéal pour assister à un spectacle de legong, danse balinaise traditionnelle.
Retrouver le calmeMais pour retrouver le calme, il n’est pas difficile de s’éloigner, car Ubud est bien placée pour visiter le reste de l’île. En taxi, il est aisé de rallier les extrémités de Bali, même si les plus courageux préféreront les mobylettes, qu’on loue pour pas grand-chose et que l’on conduit, le plus souvent, sans casque.
Sur le bord de la route, il fait bon s’arrêter à l’un des kiosques de dégustation de café des exploitations agricoles. Au domaine agricole Bali Oka, on peut ainsi déguster, sur une terrasse qui surplombe l’exploitation, cacao, thé au gingembre ou encore café au ginseng.
Mais surtout la fierté locale, le café Luwak, à la fabrication très particulière. « La civette, un petit mammifère nocturne, mange les fruits mûrs du caféier. La pulpe est digérée, mais pas les noyaux, laissés dans les excréments de l’animal, qui sont ramassés », explique Komang Pariangan, l’un des vendeurs de Bali Oka.
Les grains sont ensuite lavés et légèrement torréfiés. Forcément très rare, ce café de civette - aux arômes de caramel - est le plus cher au monde. On parle même de tasses vendues 50 livres sterling dans des cafés chics de Londres. Mais à Bali, pas besoin de s’endetter pour les années à venir, il suffira de cinq dollars pour goûter à la précieuse boisson.
Tout au nordPlus que rassasiés en caféine, on repart vers le nord. Une route mène vers l’est et le mont Batur, un volcan en activité. Mais c’est plus à l’ouest qu’on trouvera notre bonheur. Nous voilà, en quelques heures, à Munduk, le but de notre voyage. Munduk n’a pas de temple imposant, ni de cratère sur les pentes duquel randonner. A priori, rien qui distingue le petit village d’un autre, si ce n’est sa situation géographique paradisiaque.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Photo : Marie-Morgane Le Moël
Au détour d’un chemin, l’un des nombreux temples familiaux du village de Munduk. Car nous voilà au coeur d’un splendide paysage de rizières. Au point le plus haut du village, le panorama est à couper le souffle, depuis les cabines des quelques hôtels, et les terrasses des quelques restaurants locaux. Au loin, la mer de la côte Nord de Bali semble se fondre dans les nuages, tandis que les rizières d’un vert vif descendent par escaliers à flanc de montagne. À la tombée de la nuit, la vue ressemble à un tableau de Turner.
L’art du legongSi l’on parvient à s’extraire de la contemplation du paysage, ce qui n’est pas chose facile, on peut se promener de village en village, à travers des forêts et des vergers emplis de fruits exotiques. « Munduk a plus de 80 fermes, qui cultivent vanille, riz, cacao, noix de coco ou clou de girofle », énonce le guide Made Ria Wiwarman, pointant du doigt tout ce qui se mange autour de nous. Effectivement, chaque arbre semble porter un fruit. La région fait partie d’un programme de protection de l’environnement, et la terre est visiblement fertile. Pour assurer qu’elle le reste, les habitants ont d’ailleurs construit des temples de jardins, afin d’attirer la clémence des divinités.
En dehors des randonnées, autant prévenir les visiteurs en quête d’animation, Munduk n’offre pas un grand choix d’activités. Il y a bien une école de danse, qui s’active deux fois par semaine dans la salle de répétition installée au sein de l’hôtel Puri Lumbung. Nyoman Suriawan, le professeur, y enseigne l’art du legong à des dizaines d’enfants, qui doivent prêter attention à tout : expression des yeux, du visage, mouvements marqués des mains et des pieds ; la danse traditionnelle est extrêmement complexe. Alors, plutôt que d’essayer, on se contente d’admirer la grâce des jeunes danseurs, tout en se laissant gagner par la douceur de vivre de Munduk. Au fond, nul besoin de yoga ou de plage pour être un voyageur heureux. Attention, Munduk est dangereuse : une fois les pieds mis ici, il sera très difficile de repartir affronter les hordes de surfeurs du sud de l’île.
***
En vrac...Formalités : Pour les ressortissants canadiens, un passeport valide six mois après le voyage est nécessaire.
Un visa touristique de 25 dollars US, valable 30 jours, s’achète à l’aéroport de Bali (prévoir des espèces).
Transport : A / R Montréal-Denpasar à partir de 1600 dollars (hors saison).
En taxi, compter environ 25 à 30 dollars pour se rendre de Denpasar à Ubud (les trajets peuvent être organisés par votre hôtel). Environ 30 dollars pour se rendre à Munduk depuis Ubud (se renseigner sur les tarifs sur place, auprès des hôtels, mais aussi des nombreux taxis privés. Il est possible de marchander).
On peut aussi facilement louer une mobylette sur place (attention, la circulation est très dense).
***
À UbudPour les adeptes de yoga, il y a le Yoga Barn.
Le Musée Puri Lukisan est facile à trouver dans la rue principale, au centre du village.
À Munduk, les hôtels proposent tous des randonnées dans la région. Voir directement sur place.
Hébergement : Il est très aisé de se loger à des prix abordables à Bali, et Ubud regorge d’adresses. À Munduk, le Puri Lumbung Cottages offre des chambres dans d’anciens greniers à riz, avec une vue splendide sur la vallée et un très bon restaurant (à partir de 70 dollars pour deux).
Manger : À Ubud, désormais incontournable, le Casa Luna. Sa propriétaire a créé le Festival des lecteurs et écrivains, qui se tient chaque mois d’octobre.
Source:
Le Devoir