PARIS - L'épidémie de grippe porcine est en voie de stabilisation
au Mexique et aux Etats-Unis, les deux pays les plus touchés, mais si
le virus actuel semble moins virulent que redouté, les experts mettent
en garde contre la possibilité d'une deuxième vague épidémique plus
redoutable.Les
informations en provenance du Mexique et des Etats-Unis étaient
rassurantes lundi, après une semaine de crise où l'Organisation
mondiale de la santé a fait monter la pression, mettant en garde contre
l'imminence d'une pandémie.L'OMS ne baisse d'ailleurs toujours
pas la garde, traquant les éventuels indices d'un troisième foyer de la
maladie dans une autre région que celles déjà touchées, qui
confirmerait l'extension géographique de l'épidémie et signerait l'état
de pandémie déclarée.L'OMS surveille tout particulièrement la
situation en Europe, où l'Espagne apparaît comme le pays le plus
touché, avec plus de 50 cas avérés qui néanmoins "répondent
favorablement au traitement".Pour les médecins, le nouveau virus
A (H1N1) semble bien - en tout cas dans sa forme actuelle - "un
phénomène plutôt banal", comparable à la classique grippe saisonnière.
Sachant que la grippe est une maladie qui se transmet facilement et
entraîne chaque année entre 250.000 et 500.000 décès dans le monde.
Les propos rassurants des experts sont systématiquement teintés de prudence,
avec le mot "vigilance" pour leitmotiv."Nous
ne savons pas tout", martèle Catherine Leport, infectiologue à
l'hôpital Bichat (Paris) expliquant que cette incertitude est inhérente
aux maladies émergentes. "Sur un certain nombre de points on est obligé
de fonctionner par approximations progressives", indique-t-elle."Pour
l'instant les formes cliniques semblent dans la majorité des cas
bénignes, mais personne ne peut dire si l'évolution de ce virus ne va
pas se faire vers un changement de virulence, donc des formes qui
pourraient devenir plus graves", met en garde le Pr Leport.C'est
là le premier point qui incite les experts à la prudence. La seconde
crainte est de voir le virus décliner puis ressurgir "de plus belle",
selon les termes de la directrice générale de l'OMS, Margaret Chan.
Car les pandémies évoluent par vagues.L'Europe
et les Etats-Unis ont encore en mémoire la "grippe espagnole" de 1918,
la plus meurtrière, avec au moins 40 millions de morts. La première
vague s'était produite au printemps, mais c'est la deuxième, de retour
de l'hémisphère Sud, qui en octobre-novembre fut incontestablement la
plus meurtrière.Un scénario qui pourrait tout à fait se reproduire avec le nouveau virus A (H1N1).
Reste
que la donne a changé. Certes la mondialisation, et en particulier les
transports aériens, facilitent la propagation des virus. Mais les
moyens dont on dispose pour soigner les malades sont évidemment
incomparables.Il y a les antiviraux, comme le Tamiflu, à ce
stade efficaces contre la grippe porcine. Mais aussi les antibiotiques,
contre les surinfections bactériennes. Ou encore les moyens de
réanimation."En 1918 beaucoup de morts étaient dues à des
pneumonies bactériennes secondaires à l'infection virale", soulignait
ce week-end Patrick Berche, chef du service de microbiologie à
l'Hôpital Necker (Paris).A présent, c'est l'hémisphère Sud qui
est le plus exposé au virus, en raison de l'arrivée de la saison
hivernale propice à la propagation de la grippe. Une seconde vague à
l'automne laisserait au moins à l'hémisphère Nord le délai nécessaire à
l'élaboration d'un vaccin. L'industrie pharmaceutique est sur le pied
de guerre, mais attend le signal de l'OMS pour lancer le processus.