Les pyramides égyptiennes de Saqqara se languissent des touristesCéline Cornu
Agence France-Presse
Saqqara[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Des touristes prennent des photos de pyramide à Saqqara, en Égypte.
PHOTO ARCHIVES PETER ANDREWS, REUTERS Sur le chemin qui mène à la pyramide de Djozzer, sur le site archéologique de Saqqara, aucune trace de touriste. Une quinzaine de vendeurs de livres, colifichets et souvenirs attendent assis sur une balustrade le passage d'un éventuel chaland.
La révolte qui a provoqué la chute de Hosni Moubarak en février 2011 a donné un coup de frein au tourisme, secteur vital de l'économie égyptienne. Et un an plus tard à Saqqara, au sud du Caire, la reprise tarde.
«Après le 25 janvier, le tourisme s'est arrêté. Il n'y a plus de travail», déplore Saad Darwich, une dizaine de casquettes enfilées sur la tête.
Alors qu'à cette époque de l'année en moyenne un millier de touristes venait découvrir chaque jour la nécropole de Saqqara, l'une des plus anciennes et des plus riches d'Égypte, leur nombre n'oscille aujourd'hui qu'entre une poignée et 200, selon les vendeurs.
Père de cinq enfants âgés de 4 à 21 ans, Saad évalue «à 100 livres minimum» -16 dollars environ - l'argent dont il a besoin quotidiennement.
Mais «en ce moment, je ne gagne que 5, 10, 20 livres par jour. Je n'ai pas toujours d'argent pour acheter de la nourriture. Je vais au magasin et il me fait crédit, quand j'ai un peu d'argent, je le rembourse», explique-t-il. Autour de lui, les autres vendeurs acquiescent.
Chèche rouge sur la tête, Adel Abdel Hadi, habillé d'une gallabeya grise, la longue tunique traditionnelle, balade habituellement les touristes sur son âne sur le vaste site désertique.
Mais depuis la révolte, les promenades ne sont pas nombreuses. Évoquant son animal, il souligne: «Si je mange, il mange, si je ne mange pas, lui non plus».
Tous reconnaissent que leurs repas ne sont le plus souvent constitués que de pain et de fèves, alors que la viande faisait autrefois partie du menu quotidien.
«Le gouvernement ne fait rien, il ne nous donne pas d'argent», peste Saad.
L'immense majorité n'exprime néanmoins aucun dépit vis-à-vis de la révolte. Car si elle les a privés de leur gagne-pain, elle leur a amené «la liberté», souligne Mansour Fahim, 46 ans, qui vend des sculptures en albâtre.
Ils attendent désormais les résultats de la présidentielle, dont le premier tour est prévu mercredi et jeudi, et espèrent que la fin de la transition politique marquera aussi le retour des touristes.
Le nationaliste arabe de gauche Hamdeen Sabbahi, l'islamiste modéré Abdel Moneim Aboul Foutouh et l'ex-ministre des Affaires étrangères de Hosni Moubarak Amr Moussa arrivent en tête dans leurs intentions de vote.
Adel attend du nouveau président qu'il lutte contre la corruption, soulignant que sous Hosni Moubarak, ils devaient «reverser la moitié de leurs revenus à la police».
Tous souhaitent aussi qu'il rétablisse la sécurité afin de regagner la confiance des touristes effrayés par les images des violences de janvier-février 2011 et des troubles parfois meurtriers qui ont émaillé la période de transition.
«Si les touristes voient que le pays est stable et sûr, ils reviendront», pronostique Amir Samir, guide touristique, en soulignant l'importance de l'enjeu, «cinq millions d'Égyptiens travaillant dans le secteur du tourisme».
Venu avec lui, Jorge Vasquez, un Américain de Miami voyageant avec sa femme, est l'un des rares touristes à perturber ce jour-là la torpeur ambiante.
Quasiment seul dans ces sites exceptionnels, il se dit «heureux et triste en même temps: heureux de ne pas avoir à faire la queue, et triste qu'il n'y ait personne» pour soutenir l'économie du pays.
Dans un entretien à l'AFP, le ministre du Tourisme Mounir Fakhry Abdel Nour s'est dit «optimiste» pour 2012, qui devrait selon lui renouer avec les niveaux records atteints en 2010.
«Le taux d'occupation des hôtels du Caire est en train de connaître une amélioration», même si elle n'est «pas énorme», dit-il.
La reprise est plus rapide «en mer Rouge ou au Sinaï, surtout dans les destinations balnéaires, qui continuent de représenter plus de 85% du mouvement touristique», aux dépens de Louxor et d'Assouan.
Source:
Cyberpresse.ca