L'hanok aiméeCarolyne Parent [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Photo : Carolyne Parent
La Bukchon Guesthouse, dans le quartier du même nom. Séjourner dans l'habitat traditionnel local, qu'il s'agisse d'une yourte mongole, d'une bure fidgienne ou d'une maison-saucisse argentine, est une expérience que de plus en plus de voyageurs souhaitent vivre. Et lorsqu'un type d'habitation unique s'en trouve du coup préservé, comme c'est le cas à Séoul, tout le monde y gagne.
Séoul — C'est une belle maison de pierre et de bois, constituée de structures en forme de «L» repliées sur elles-mêmes. C'est une habitation conviviale, dont toutes les pièces s'ouvrent sur une cour intérieure. C'est l'hanok coréenne, que le gouvernement métropolitain de Séoul protège contre vents et promoteurs.
Alors que Pékin rase ses hutongs, la capitale de la Corée du Sud — et, l'an dernier, la Capitale mondiale du design — bichonne depuis 2001 le Village Bukchon, un quartier composé d'environ 1000 hanoks. Au mois d'avril dernier, la Ville avait déjà soutenu, au moyen de subventions aux propriétaires, la rénovation de 303 des 439 hanoks inscrites au registre du programme, selon le Centre de la culture traditionnelle de Bukchon. Elle en a par ailleurs acheté une trentaine, qui ont été converties soit en écomusées, soit en maisons d'hôtes. Reconnaissant la valeur du projet, l'UNESCO lui décernait son Prix du patrimoine Asie-Pacifique en 2009.
Un atout touristiqueObjet de fierté nationale, l'hanok réhabilitée ne profite pas qu'à son propriétaire: elle bonifie aussi l'offre touristique séoulite, et deux fois plutôt qu'une. Aux visiteurs, l'hanok guesthouse offre une option d'hébergement originale, authentique et abordable au coeur de la grouillante mégapole de 10 millions d'habitants. Et s'ils n'y logent pas, ils se pressent tout de même à Bukchon, l'ancien fief des nobles sous la dynastie Joseon (1392-1910) et aujourd'hui l'un des secteurs les plus dynamiques de la ville. «Depuis deux ans, le quartier se développe tellement vite, note Lee Hee-joo, une résidante. De nouvelles galeries d'art et boutiques apparaissent tous les mois. On a vécu en paix ici pendant des siècles, et maintenant, on vient de partout nous visiter.» Mais Mme Lee ne s'en plaint pas du tout: elle a elle-même ouvert deux restos!
Situé entre deux des plus beaux palais de Séoul, à l'ombre d'une chaîne de montagnes dominée par le mont Baegak, Bukchon (ou «village du Nord») s'est densifié au début du XXe siècle alors que ses vastes terrains ont été subdivisés en petits lots pour accommoder un afflux de population au centre-ville.
Il en a résulté un village de venelles tricotées serré et bordées d'hanoks datant pour la plupart des années 1920-30. Un village photogénique aux rues pentues, comme à San Francisco, qui tranche drôlement avec la Séoul moderne et son architecture souvent délirante. Un village vivant où coexistent résidants, commerçants et artisans. Ainsi, dans une hanok, on peut voir à l'oeuvre des maîtres de la laque; dans une autre, des brodeuses; dans une autre encore, des vanneurs; plus loin, des ébénistes, des joailliers.
Des salons de thé traditionnels occupent aussi plusieurs de ces maisons, où on peut siroter une infusion d'un rouge éclatant appelée «thé des cinq saveurs» et déguster d'exquis gâteaux de riz. Outre quelques édifices construits dans les années 1960 et qui détonnent, l'ensemble bâti de Bukchon est d'une remarquable harmonie.
L'éco-logisL'hanok elle-même est harmonieuse et de construction aussi futée qu'écologique. Ses longs avant-toits protègent du soleil comme de la pluie. Les armatures des portes coulissantes et des fenêtres sont tapissées de papier huilé qui laisse filtrer la lumière tout en préservant l'intimité des occupants. Ses structures de bois sont posées sur des podiums, tant pour minimiser les problèmes d'humidité que pour permettre l'installation d'un ondol, un système de chauffage à eau chaude ou électrique par le sol. Conséquemment, les pièces d'une hanok sont souvent petites, parfois lilliputiennes, afin de favoriser la rétention de la chaleur.
«Chérie, j'ai réduit la chambre... ou grossi la valise!», s'exclamera le client occidental d'une hanok-maison d'hôtes. En second lieu, il demandera où est le lit... Mais il n'y en a pas, pas plus qu'il n'y a de chaises, de canapés, alouette! Depuis son apparition dans la péninsule coréenne il y a 2000 ans, l'ondol favorise un mode de vie au sol: on dort sur des couettes posées par terre et on s'assoit également par terre. Une manifestation de la simplicité volontaire avant la lettre. Par contre, s'il n'y a pas de lit, il y a souvent le wi-fi!
Plusieurs de ces hanoks préparent pour leurs hôtes des classiques de la cuisine coréenne, où le kimchi, du chou chinois pimenté et fermenté, est à l'honneur. D'autres servent le thé au jardin, sous les plaqueminiers, et organisent des récitals de musique d'époque. Certaines font voir aussi leur collection d'hanboks, le superbement coloré habit traditionnel que les Coréens ont porté jusque dans les années 1950. Autant de façons, pour l'étranger, de prendre le pouls de la culture locale, et pour le Coréen de perpétuer son histoire. Non, vraiment, l'UNESCO ne s'y est pas trompée: chapeau, Séoul!
En vracExplorer Bukchon: le Centre de la culture traditionnelle de Bukchon (105, Gye-dong, Jongno-gu) édite une brochure qui propose trois parcours thématiques dans le quartier. Indispendable pour s'y retrouver dans ce labyrinthe!
Séjourner dans une hanok: c'est possible dans la plupart des grandes villes de la Corée du Sud, île de Jeju comprise. À Séoul, la modeste ex-résidence d'un célèbre peintre paysagiste, la Bukchon Guesthouse, est une bonne adresse. Les tarifs à la nuitée varient de 40 000 à 100 000 wons (de 35 $ à 89 $), petit-déjeuner compris.
Flâner à Namsangol: rapatriées dans un parc au centre de Séoul, cinq grandes hanoks, celles-là ayant appartenu pour la plupart à de hauts dignitaires de la période Joseon, constituent le village Namsan (ou Namsangol). Des animations — calligraphie, vannerie, cérémonie de mariage, jeux d'adresse anciens, etc. — y sont programmées tous les jours.
Admirer l'audace de l'ex-maire de Séoul: tout comme la revitalisation du quartier Bukchon, la création de la promenade Cheonggye, un attrait majeur de la capitale depuis son inauguration en 2005, force l'admiration. Et pour cause: elle remplace une autoroute surélevée qui défigurait le centre-ville. Aussitôt élu maire, en 2002, Lee Myung-bak, aujourd'hui président du pays, l'a fait démolir pour mettre au jour le ruisseau Cheonggye et le border de part et d'autre d'un corridor vert piétonnier sur près de six kilomètres! M. Lee pourrait peut-être nous venir en aide dans le dossier de l'autoroute Bonaventure...
S'inquiéter ou pas? Oui, ç'a bardé entre Séoul et Pyongyang en novembre dernier, et les tensions entre la Corée du Nord et la Corée du Sud persistent. En conséquence, le ministère des Affaires étrangères recommande d'éviter tout voyage dans les îles sud-coréennes du nord-ouest, mais n'a émis aucun avertissement pour le reste du pays.
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